Centenaire de la Première Guerre Mondiale

Dans le cadre des commémorations du centenaire de la Grande Guerre, le service des archives du Consistoire Central vient de créer la commission de recherche des documents sur les israélites de France, d’Alsace-Moselle et d’Algérie. Nous avons tous dans nos familles un arrière grand-père ou un grand-père qui a servi dans les rangs de l’armée française entre 1914-1918, sur le front de Verdun ou des Dardanelles. 
Pour que son histoire et celle des juifs dans la Grande-Guerre ne soient pas oubliées, merci de prendre contact avec le Conservateur des archives du Consistoire Central M. P. Landau docteur en histoire spécialiste du sujet et/ou de lui adresser toute copie de correspondance, photographie ou document au 19, rue Saint-Georges 75009 Paris.



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Livre :  » 1914-1918 les juifs dans la tourmente » de Gérard Sylvain

L’auteur n’est pas inconnu. Amateur des cartes postales traitant tous les thèmes concernant les juifs de par le monde, il s’était déjà illustré en publiant dans les années quatre-vingt deux somptueux ouvrages sur les destins juifs en diaspora et sur la Question juive en Europe. Cette fois, centenaire oblige, il récidive en apportant les fruits de son inlassable recherche sur les communautés israélites pendant la Grande Guerre.


L’idée est originale et féconde car elle ressuscite des tiroirs et des albums maintes images qui témoignent encore d’un passé où les israélites, comme ils étaient nommés à l’époque, participaient au conflit mondial. C’est alors l’occasion de mieux comprendre certaines séquences qui allaient marquer durablement les esprits, du moins jusqu’à l’avènement du nazisme et l’effondrement du judaïsme européen. 

Grâce à Gérard Sylvain, il est possible de mieux comprendre le patriotisme et les espérances des juifs avec ces illustrations en sachant que la correspondance était bien souvent l’unique lien qui liait les familles. Après sa ration dans la tranchée, le « poilu » attendait avec impatience le courrier qui lui permettait de garder un contact encore humain avec l’arrière et ses proches. 

C’est donc un voyage tourmenté au sein de l’Europe en guerre que le lecteur va connaître au fil des pages abondamment illustrées et habilement commentées. Du front des Vosges aux territoires russo-polonais, de Salonique aux rives du Jourdain, il pourra enfin découvrir une infime partie de ce que furent les réalités juives à cette époque. 

L’Union sacrée est aussitôt célébrée. Tous les citoyens ou sujets sont alors appelés à défendre la cause sacrée de la patrie. Si une carte postale française met en scène le grand rabbin de Lyon Abraham Bloch aux côtés d’un pasteur et d’un prêtre, une autre, d’origine allemande, représente Moïse qui prie pour la victoire des armées du Reich. Même la Russie où les juifs sont pourtant discriminés fait appel à la concorde ! Alors que la France, dans un esprit républicain, ne met pas en scène des combattants israélites, il en est autrement pour l’Allemagne qui insiste sur le rôle de l’aumônerie militaire israélite et sur les enjeux de l’émancipation auprès des juifs polonais. Le judaïsme sert aussi de relais à la propagande qu’elle mène à l’encontre de la Russie pogromiste alors alliée à la terre des droits de l’homme ! 

Du côté allemand, maintes scènes concernent les Juifs, tantôt en prière dans un cantonnement tantôt en présence de prisonniers. C’est un moyen d’insister sur la guerre libératrice que dirige l’empereur Guillaume II. En France, les cartes postales évoquent surtout la barbarie prussienne d’où les synagogues dévastées, en particulier celle de Lunéville et surtout la condamnation à mort du jeune David Bloch, fusillé par les Allemands à l’âge de vingt ans. Toutefois, il ne faudrait pas croire que la carte postale conserve toujours ces aspects bienveillants. Dès que la guerre s’enlise à partir de 1915, l’antisémitisme s’affiche lui aussi, uniquement sur le front est. Le juif apparaît alors sous d’autres traits : malingre et profiteur. L’Autriche, l’Allemagne et la Russie commencent à diffuser de telles illustrations qui vont bien sûr pénétrer les esprits. Même les Etats-Unis n’échappent pas aux préjugés en imprimant une carte postale sur laquelle est écrit : « Tous les juifs échappent au front ».

L’étude se poursuit dans les années vingt et permet d’appréhender la violence de guerre en temps de paix. Outre les photographies des futurs responsables nazis, le lecteur comprend que la responsabilité de ce conflit, qui fit sombrer l’Europe, repose principalement sur les Juifs. Les voici désignés comme étant des comploteurs internationaux et les principaux bénéficiaires de l’hécatombe. 

Si à l’automne 1914, le juif présentait plutôt une image positive ; à la veille de l’avènement du nazisme, il est honni et son patriotisme bafoué. A elle seule, la carte postale transmet aussi un message politique. Avec Gérard Sylvain, nous savons désormais que l’histoire peut aussi se lire à travers la carte postale.