Etre libre : s’engager et choisir de servir l’Eternel, par Haïm Korsia

 Chavouot nous donne à nous remémorer le don de la Thora sur le Mont Sinaï. Je dis bien remémorer et non pas commémorer, car il ne s’agit pas de célébrer un événement du passé, mais de vivre un moment présent. Tout comme à Pessah nous devons considérer que nous sortons réellement d’Egypte, de notre Egypte personnelle. Demain, nous serons à nouveau au pied de la montagne pour recevoir le texte divin. Que devons- nous retrouver comme élan pour revivre pleinement ce que nos ancêtres ont compris ?

Au-delà de tout, ils étaient enfin libres. Et ils firent pourtant le choix de se soumettre au joug de la Thora. Ils ont compris qu’un homme libre n’est pas celui qui ne fait que ce qu’il veut, c’est-à-dire souvent rien, mais plutôt celui qui accomplit ce qu’il doit. C’est la notion de mitsva, d’ordre, de commandement qui émerge alors. Et c’est ce que nous devons retrouver.

En effet, il nous est difficile d’accepter contraintes et engagements. C’est la réalité d’un monde où une grande marque de téléphonie fait sa campagne de publicité sur le fait de n’être pas lié, ni pour 24 mois, ni pour 12 mois, ni pour rien. Libre. Mais le judaïsme prône l’inverse. Il chante les mérites de l’engagement, de la fidélité, des promesses renouvelées. Lorsque nous avons affirmé au pied du Mont Sinaï « Naassé vénichma », nous accomplirons et nous comprendrons, c’était dans l’espoir que les générations suivantes réenchanteraient cette affirmation, jour après jour, année après année. Dans l’espoir que notre génération, que nos enfants, sachent trouver encore et toujours cette force de faire le choix de suivre la parole divine.

Notre fidélité à cette promesse est le coeur de la pérennité du peuple juif. Mais lorsque le peuple clame « Naassé » (Exode XIX, 8), le texte biblique ajoute un mot primordial : Yahdav, ensemble, uni, dans un projet d’unité. Le peuple répond à l’Eternel, avant même de s’engager à pratiquer Ses commandements, Nous serons toujours unis. Ce qui est plus qu’une réponse, un véritable projet toujours aussi urgent de nos jours.

Sans juger ce que font les uns ou les autres, ou ce qu’ils ne font pas, il faut accueillir, aimer, respecter celui qui veut juste, à sa façon, se rapprocher de D’ieu, même si ce n’est pas parfait, car c’est le sens exact de l’unité: la complémentarité. Chacun compense les manques de l’autre et le peuple accomplit la Thora dans son intégralité, à condition d’être rassemblé. Même si chaque personne ne respecte qu’un seul commandement, il reste la solution d’être 613 personnes afin que l’intégralité de la parole divine soit vivante et source de vie. Et la liberté, y compris dans ce sens, est l’une des grandes idées de ce temps où le nom même de la fête n’est pas précis.

En effet, la Bible ne mentionne pas le sens de la fête de Chavouot. Certes, il y a dans la Thora une référence à la “Fête de la Moisson” (Exode, XXIII, 16), une autre à la “Fête des Prémices” (Exode XXIV, 22), une troisième qui parle de “Sept semaines après Pâque” (Lévitique, XXIII, 15 à 22), et enfin une dernière qui présente la “Fête des Semaines” (Deutéronome, XVI, 9 à 12). Mais il n’y a pas la raison de la fête.

Contrairement aux deux autres fêtes de pèlerinage, Pessah et Souccot, la date de Chavouot n’est pas fixée dans la Thora. Il est juste dit « Le cinquantième jour du lendemain du Chabbat”, que les Maîtres du Talmud traduisent par le “lendemain de Pessah”.

Il y a une grande liberté pour chacun à pouvoir vivre son lien à la Thora comme il le construit. Cette liberté, que beaucoup utiliseraient pour s’affranchir de toutes les obligations, nous l’utilisons pour choisir de servir l’Eternel, aussi bien que possible, chacun avec ses convictions et ses engagements car chacun peut appeler la fête comme il le ressent, puisque plusieurs noms existent. Et si même la date de Chavouot n’est pas précise, c’est qu’il serait terrible de n’avoir qu’un seul Jour de la Thora, alors que nous avons 365 jours dans l’année qui sont des Jours de la Thora.

Bonne fête de Chavouot et recevez la Thora dans la joie. ‘Hag Chavouot Samea’h !

(Extrait d’Actu J du 21/05/2015)

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